Glad Amog Lemra : la beauté jouit de la bonté   

« La poésie est le monde, et la finance, une école, une particule du monde », affirme Glad Amog Lemra, poète, cinéaste et diplômé en gestion et finances, installé à Montréal, au Canada. À l’occasion du mois de la poésie, le Magazine OU’TAM’SI est allé à sa rencontre.

Bonjour, Glad, et merci d’avoir accepté de nous accorder cette interview. Vous êtes un poète actif et vos ouvrages sont appréciés par les lecteurs, que représente pour vous la poésie ? Toute personne est-elle un poète qui s’ignore ?

Bonjour, OU’TAM’SI MAGAZINE. Tout être humain est une espèce de terre fertile prédisposée à recevoir une semence et en produire le fruit. En revanche, le poète, n’est pas qu’une terre, mais une terre Romantique. Le poète est un esprit, un être humain mandaté à révéler des rayons de vérités, en quête de façon permanente à la compréhension humaine et à l’illustrer sans concession, ni compromis, autrement c’est un écrivain de métier.  

Quel est le lien entre la poésie et la finance ? Comment ou pourquoi êtes-vous devenu poète ?

La poésie est le monde, et la finance, une particule du monde. Je ne suis pas devenu poète, ce n’est pas un cursus, ce n’est pas un galon, c’est une identité romantique déterminée par un esprit qui dit les maux de la société et chante les louanges de la beauté, la bonté, l’amour, la tolérance…

Quelles sont, selon vous, les qualités requises pour se lancer dans la poésie ?

La poésie n’est pas un tribunal de mots, encore moins un jardin potager de vers ou de proses. Des mots sans âme sont semblables à un fleuve sans poissons. Au risque de me répéter et de ne pas être compris, je dirai certainement l’affranchissement de soi par rapport à l’existence est l’ultime qualité requise au-delà d’une prédisposition à conquérir la connaissance. Plus haut, j’essayais de faire comprendre que la poésie ne s’apprend pas, c’est une expression d’émotions. Ce qui s’apprend c’est l’écriture de la langue dans laquelle cette expression est transcrite. S’affranchir c’est départager le matériel (humain) de l’esprit pour dire fidèlement la nature de l’être humain.

Lors de la création d’un poème, qu’est-ce que vous vous dites personnellement ?

J’ai envie de vous dire, rien, sinon qu’essayer de transcrire un état d’esprit, matérialiser une émotion, vomir une gêne, révéler une interrogation ou une incompréhension… avec un vocabulaire propre à moi.

De façon générale, quel message souhaiteriez-vous faire passer en tant que poète et quelle cause défendez-vous en écrivant ?

En tant que poète, aucun message, parce que ma poésie étant est expression d’émotions, je ne saurais la commander à l’instant présent. En revanche, en tant qu’écrivain, le déteste l’injustice humaine incarnée par la société, sous toutes ses formes, elle me ronge.

En 2019, vous avez publié un ouvrage intitulé « Négritudesque », quelle en est l’ossature ?

Mon incompréhension de la société africaine, j’ai eu l’impression que sous certains cieux l’être noir nageait dans une sorte de soumission morbide, leurs gouvernants en premier. Que penser par soi-même, réfléchir et analyser une situation était un blasphème ou une atteinte à la sûreté d’un état, parce que le politique aurait déjà pensé à la place de tous. Donc ne pensez plus, débarrassez-vous de cette cervelle qui n’est qu’un ornement. Alors qu’il y a eu un courant littéraire et politique, la Négritude avec Sédar Senghor, Aimé Césaire… pour ne citer que ceux-là… qui se sont indignés face à l’impérialisme et cultivé une prise de conscience de l’être noir. Malheureusement, les ambassadeurs démocratiquement impérialistes qui gouvernent certains États noirs semblent implorer l’indignation… D’où « Négritudesque » une forme d’exclamation face à cette ambivalence. Heureusement qu’à côté de cela, il y a encore de l’Amour qui alimente nos cœurs. Somme toute, Négritudesque est une sorte de melting-pot romantique, avec de la poésie, des récits et du théâtre.  

Quel état des lieux faites-vous aujourd’hui de la poésie dans l’univers francophone ?

Fleurissant par sa forme, qui semble être définitivement une manne populaire, politiquement correcte, qui rapproche ses pages en vers et proses vers un rayon de soleil sombre qui finit par consumer toutes ces pages au final.  Dans son fond, elle doit davantage sortir de cette espèce de secte réservée à ce que l’on appelle « intellectuel » pour servir à la société tout entière et non à une caste de marionnettiste.

Sur quels projets travaillez-vous actuellement ?

Deux projets cinémas, documentaire et fiction, et une nouvelle transcription d’émotions.

Si votre vie était une poésie, quels en seraient les vers ?

La beauté jouit de la bonté   

Un mot pour le mois de la poésie au Québec ?

Que le mois de la poésie au Québec soit un mois de noces pour la forme et le fond poétiques.

Franckh Esperant NOMBO

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Vous aimeriez lire également:

Photo de Gilféry Ngamboulou

Conversation avec Gilféry Ngamboulou

Originaire de Brazzaville, Gilféry Ngamboulou incarne une voix singulière du théâtre contemporain, alliant sa culture congolaise à une carrière florissante en France. Installé à Avignon depuis 2020, ce comédien, metteur en scène, et auteur a d’abord décroché une Maîtrise en Sciences économiques à l’Université Marien Ngouabi, avant de suivre sa passion artistique jusqu’à l’Université d’Avignon, où il a obtenu un Master en Arts, Lettres et Langues. Ces deux villes, riches de leurs propres influences, forment le socle d’un parcours où rigueur intellectuelle et création théâtrale s’entrelacent pour donner naissance à des œuvres profondément humaines et engagées.

Lire plus

De père en fille : Francis et Noémie Bélime

Il y a deux ans, Francis Bélime publiait « Déraciné », une œuvre poétique dans laquelle il partageait sa vie heureuse d’homme déraciné, tirant le meilleur de deux cultures. Cette année, avec toujours les illustrations de sa fille Noémie Bélime, ses mots, à travers « Derrière les masques », relatent son expérience de la pandémie de Covid-19. Ensemble, Francis et Noémie montrent qu’au-delà de la pandémie ou de toute autre catastrophe, l’amour et l’espoir demeurent des piliers essentiels. Nathasha Pemba est allée à leur rencontre.

Lire plus

Conversation posthume (imaginée) avec Tchicaya U Tam’si

Nathasha Pemba : Pour ouvrir cette conversation, je voudrais citer le passage bien connu de Théorie de la justice où John Rawls souligne le lien essentiel entre la justice et la liberté. Chaque personne possède une inviolabilité fondée sur la justice qui, même au nom du bien-être de l’ensemble de la société, ne peut être transgressée.

Lire plus

À la rencontre de Lise Létourneau

Bonjour, Lise, comment allez-vous ? Bonjour, Pénélope, c’est un plaisir de participer à votre magazine. L’art et vous c’est incontestablement une histoire d’amour. Comment est-il venu vers vous ? Je crois que j’ai toujours été très créative, alors, lorsqu’il a été le temps de choisir une orientation, j’ai décidé de m’inscrire aux Beaux-Arts de Montréal, au grand

Lire plus

« Si on me presse de dire pourquoi je l'aimais, je sens que cela ne peut s'exprimer qu'en répondant : Parce que c'était lui, parce que c'était moi. »

Publicité

un Cabinet de conseil juridique et fiscal basé à Ouagadougou au Burkina Faso

Devis gratuit