Vers l’embellie -Fernand Ouelette

La trajectoire littéraire d'Ouellette s'est étendue sur plusieurs décennies, au cours desquelles il a enrichi le monde de la poésie, des essais et des critiques à travers une pléthore d'œuvres. Son écriture, souvent ancrée dans les thématiques de l'identité, de la langue et de la condition humaine, a profondément captivé les lecteurs. Impliqué dans divers mouvements culturels et artistiques au Québec, il a activement contribué à l'épanouissement de la scène littéraire de cette province, en la nourrissant de sa vision et de son engagement. La lecture de son dernier recueil, "Vers l'embellie", a suscité un vif intérêt, témoignant de son pouvoir évocateur et de sa pertinence continue dans le paysage littéraire contemporain.

La lecture de la poésie est une décision transcendante, une élection où l’âme s’immerge dans les eaux miroitantes des vers. Tel est le mystère de ceux qui s’abandonnent à son appel. Car en vérité, ce n’est pas nous qui choisissons la poésie, mais elle qui nous élève et s’impose à nous, telle une force vitale inébranlable. Fernand Ouellette, figure emblématique de la poésie québécoise, incarne cette essence même, guidé non par les conventions, mais par l’inspiration pure, offrant ainsi une poésie délicate, une poésie de l’existence, empreinte de simplicité et d’authenticité.

Paru aux Éditions de la Grenouillère en l’an 2023, Vers l’embellie se dresse comme un joyau poétique, façonné par la plume magistrale de Fernand Ouellette, poète québécois né en 1930. Ce recueil, véritable phare dans le paysage de la poésie québécoise, témoigne de l’empreinte indélébile laissée par son auteur au sein de la francophonie. Salué pour son style empreint d’élégance et sa capacité à saisir les nuances les plus subtiles des émotions humaines, il s’est inscrit comme une référence incontournable de la littérature québécoise et canadienne-française. Les distinctions et prix qui ont jalonné son parcours attestent de la reconnaissance unanime dont il bénéficie, tant pour son œuvre poétique que critique. Ainsi, ses écrits continuent de rayonner et d’inspirer les amoureux de la poésie francophone, ici au Canada et au-delà des frontières.

Vers l’embellie nous convie à un voyage intérieur, explorant les méandres de l’existence à travers une palette de thèmes aussi vastes que la vie elle-même. La mort, l’espoir, les rêves, la nature, la nostalgie, la quête de sens… autant de fils tissés avec habileté dans la trame de ces poèmes. Ouellette nous invite à contempler la beauté fragile de l’existence, à danser avec les étoiles sur l’océan des possibles, et à chercher inlassablement la lumière même au cœur des ténèbres.

A force d’errer

Au plein des ténèbres,

L’être parvient à étinceler.

S’éveillent en lui des rubis

Sonores de mésange.

Tout le désir s’ouvre à la lumière,

Dès que l’horizon du matin le terrasse :

Voici l’instant parfait de plénitude

Pour dévisager la mort

Dans cet extrait éclairé du recueil, intitulé « Matin », l’auteur nous guide avec délicatesse à travers les méandres de l’existence, depuis les ombres épaisses de la confusion jusqu’à l’aube dorée de la compréhension. Il esquisse avec finesse le cheminement ardu et ténébreux de l’âme, une errance à travers les tréfonds de l’obscurité intérieure.

Pourtant, au cœur de cette obscurité, émerge une révélation transcendante : « L’être parvient à étinceler ». C’est une métamorphose intérieure, une transformation où l’individu, malgré les embûches, parvient à rayonner de sa propre lumière. Les « rubis sonores de mésange » évoquent alors la beauté et la clarté qui peuvent jaillir de cette noirceur. Les « rubis » symbolisent ces moments précieux, ces instants de lumière au sein de l’ombre, tandis que la « mésange » incarne la légèreté et la liberté retrouvées.

Néanmoins, l’illumination ne vient pas seule. Il faut se laisser guider par le désir, s’ouvrir à elle lorsque l’horizon du matin se dessine à l’horizon. C’est là un appel à la métamorphose, à la transmutation vers quelque chose de plus lumineux, empreint d’espoir. Cet « instant parfait de plénitude » semble alors être le point culminant de cette quête, un moment de transcendance où même la mort peut être confrontée avec courage et acceptation.

Ainsi, à travers ces vers empreints de poésie et de profondeur, l’auteur nous convie à un voyage initiatique, de l’ombre à la lumière, de la confusion à la clarté, de la mort à une nouvelle forme de vie ou de perception.

Toujours se travailler l’âme

Sans écouter sa lamentation.

Se tendre vers les mots lumineux

Jusqu’à l’extrême.

Alentour tout est au ras

De ce qui meurt

Ou se refuse au chant.

Il faut tant d’astres en soi

Pour survivre, isolé à l’horizon,

Et se sentir dans le matin

Qui va tout ennoblir.

Dans l’œuvre de Ouellette, l’essence même de la transformation intérieure réside dans une profonde introspection et un engagement inébranlable envers le développement spirituel. Il nous exhorte à « Toujours se travailler l’âme », à plonger au plus profond de notre être pour en explorer les méandres. Pourtant, cette quête exige un effort conscient, une volonté ardente de comprendre et d’enrichir notre être intérieur. Malgré les lamentations qui peuvent parfois hanter notre chemin, il est impératif de transcender les plaintes et les regrets qui risquent de nous entraver dans notre ascension spirituelle. Ouellette nous appelle à nous affranchir des pensées sombres et des sentiments de désespoir.

Dans ce périple terrestre, l’humain est encouragé à « Se tendre vers les mots lumineux jusqu’à l’extrême », à s’ouvrir à ce qui est positif, inspirant et édifiant. Il nous rappelle l’importance de puiser dans les enseignements spirituels, la littérature inspirante et les relations enrichissantes pour nourrir notre quête de sagesse et de croissance personnelle.

Toutefois, Ouellette ne détourne pas le regard des réalités environnantes. Il scrute sans détour le contexte tumultueux où la mort et la résistance à la métamorphose semblent prévaloir (« Alentour tout est au ras de ce qui meurt ou se refuse au chant »). Cette vision saisissante reflète les défis et les adversités extérieurs qui jalonnent le chemin vers l’épanouissement personnel et spirituel. La métaphore des « astres en soi » évoque alors la nécessité de cultiver une richesse intérieure, une lumière intime capable de nous guider et de nous soutenir, même lorsque l’horizon semble obscurci par les nuages de l’incertitude.

Enfin, une lueur d’espoir perce à travers les ténèbres, dans la dernière ligne : « Et se sentir dans le matin qui va tout ennoblir ». Le matin, symbole de renouveau et de possibilité, offre une promesse de transformation et de régénération. C’est une invitation à accueillir la lumière naissante qui, telle une caresse matinale, peut élever et embellir chaque parcelle de notre existence.

Percée au cœur de l’âme,

Qui permet d’avancer

Là-bas où l’horizon bascule,

Ouvre les présences.

Oui j’explore un temps

Qui se capte si peu par les mains,

Par les mots. L’esprit se sent menacé

Par la nuit qui va le recouvrir.

Quand de nouveau le désir

Va-t-il s’élancer ?

Dans les vers envoûtants de ce recueil, Fernand Ouellette nous invite à un voyage intérieur, où chaque être humain est appelé à se rencontrer au cœur même de son âme. Il exhorte à valoriser ce désir intime de transcender les limites de l’existence quotidienne pour s’élever vers de nouveaux horizons spirituels. « Percée au cœur de l’âme » évoque ainsi une exploration profonde et intime de soi-même, une quête où les strates superficielles de l’être sont dépassées pour accéder à une vérité plus profonde et révélatrice.

L’auteur nous guide ensuite vers cette frontière où l’horizon bascule, symbolisant une expansion de conscience audacieuse, où l’individu brave les frontières habituelles de sa compréhension pour s’aventurer vers des territoires de découverte et de croissance inexplorés. L’ouverture aux présences, cette dimension intérieure évoquée par Ouellette, nous enseigne à habiter le monde avec sensibilité, sans jamais oublier la richesse des connexions qui nous entourent.

Pourtant, malgré cette quête intérieure, le poète reconnaît la difficulté de capturer et de transmettre cette expérience par des moyens conventionnels tels que les mains ou les mots. Cela souligne la nature ineffable et profonde de l’expérience spirituelle, qui échappe souvent à toute tentative de description. La dernière strophe exprime ainsi un désir ardent pour la renaissance du désir, une impatience peut-être de retrouver cet élan vital et cette aspiration qui propulsent l’âme vers de nouveaux horizons.

Ce recueil précieux de Fernand Ouellette, qui trouvera une place de choix dans ma bibliothèque, célèbre l’expérience spirituelle et en souligne l’importance vitale. Il rappelle que, malgré nos tentatives de reléguer le transcendant au second plan, la spiritualité et l’intériorité demeurent des piliers indispensables pour affronter les vicissitudes de la vie. Le spirituel donne un sens profond à notre existence et nous guide sur le chemin du mieux-être.

Je vous le recommande vivement !

2 commentaires

  1. Attention. Il s’agit de Fernand Ouellette et non de Pierre Ouellette (comme il est indiqué à la fin de l’article). Erreur bien normale puisqu’il existe un Pierre Ouellet (noter la différence du nom de famille) qui est aussi poète (et qui a publié chez La Grenouillère). Merci de corriger si possible. Très bel article. Une lecture éclairante!

    1. Merci infiniment, Louis-Philippe !

      Votre remarque a été prise en considération avec gratitude.

      Nous sommes enchantés que l’article vous ait plu. Vos encouragements constituent une véritable source de motivation pour notre équipe.
      La spiritualité est un élément essentiel de toute existence, et Fernand Ouellette le souligne admirablement dans certains de ses poèmes.

      Nous avons hâte de vous revoir sur notre site.

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