Laurent Robert explore une variété de formes et de styles poétiques dans son recueil composé de 100 poèmes. Il offre une expérience riche et diversifiée pour les lecteurs. En intégrant des genres allant du haïku au sonnet en passant par le tanka, il démontre sa mobilité et son engagement envers la diversité de la poésie. Le titre même du recueil, « Sans morale », suggère une immersion profonde dans la créativité poétique, voire une exploration quotidienne et intense de la morale, de l’amoral ou de l’immoral. L’idée d’écrire 100 poèmes évoque une durée étendue, incitant (certainement) le lecteur à envisager la possibilité de lire un poème par jour pendant 100 jours. Cette période prolongée, comme une éternité, invite à une profonde introspection et à une contemplation sans fin, chaque poème devenant une étape dans le voyage intérieur de l’auteur.

Dans Sans morale, Laurent Robert se lance également dans des expérimentations artistiques courageuses (osées) en intégrant des éléments spatiaux et picturaux dans ses poèmes. Cette exploration de l’interaction entre l’espace et l’image donne lieu à des créations poétiques uniques et innovantes, où la forme et le contenu se fondent pour créer une expérience sensorielle et esthétique immersive. La couverture du recueil, ornée de sculptures et de personnages construits à partir d’instruments de travail, témoigne de cette approche novatrice. Ce mélange de matérialité et de perception sensorielle invite le lecteur à une expérience poétique qui transcende les frontières traditionnelles de la poésie.

Par ailleurs, l’accent mis sur l’écriture picturale dans certains poèmes, comme celui mentionné à la page 111, démontre la volonté de l’auteur d’explorer les possibilités expressives offertes par la forme visuelle. Cette utilisation de la forme pour présenter un poème expressif ouvre de nouvelles voies d’exploration artistique et renforce l’idée que la poésie ne se limite pas seulement aux mots, mais se manifeste aussi à travers des images et des dessins évocateurs.

Ce poème à lui seul est une œuvre singulière, car il explore des thèmes inhabituels et peut-être même tabous, tels que le sexe et la cuisine, d’une manière symbolique ou métaphorique. Son authenticité réside dans sa capacité à affirmer une identité spécifique tout en utilisant certains thèmes comme moyen d’expression artistique. L’association du sexe et de la cuisine peut aussi être interprétée comme une exploration de la sensualité et de la satisfaction, ainsi que comme une métaphore de la vie elle-même, où le plaisir et la nourriture sont des éléments essentiels de l’existence humaine. Cette combinaison de thèmes évoque le plaisir, le désir et la satisfaction sensorielle.

On peut la considérer comme une parole créatrice : l’utilisation potentielle de l’accent vietnamien dans la lecture du poème. En effet, elle ajoute une dimension supplémentaire à l’œuvre, en intégrant des éléments culturels spécifiques et en enrichissant la signification du texte. Peut-on parler de complexité et de profondeur à l’exploration de l’identité culturelle et de la diversité linguistique ?

Ce poème plonge le lecteur dans les aspects les plus sombres et troublants de la condition humaine, en utilisant un langage incisif et provocateur pour explorer des idées sur la complexité de l’existence. Le titre même, « Apprentissages sournois », suggère que les leçons enseignées peuvent être trompeuses, voire peu orthodoxes, peut-être même sans morale. La métaphore évoquée dans la suite du poème suggère une transition violente ou brutale, une transformation difficile à travers laquelle l’amour est dépeint comme menteur ( soulignant ainsi la tromperie et les faux-semblants qui peuvent exister dans les relations amoureuses, par exemple). L’expression « âme chienne » ajoute une dimension supplémentaire, évoquant une image de l’âme en tant qu’entité vicieuse ou trahissante en puissance.

Cette exploration des instabilités et des déséquilibres dans les relations humaines, soulevée par Laurent Robert, à travers ce poème, met également en lumière le besoin d’adaptation, d’ajustement et de compromis pour faire face aux circonstances changeantes ou difficiles de la vie. L’auteur suggère que parfois, les manipulations et les artifices peuvent avoir des effets positifs, même s’ils peuvent sembler trompeurs à première vue.

In fine, « Sans morale » offre une méditation profonde sur les aspects les plus sombres et les plus complexes de la nature humaine. Il met en lumière les paradoxes et les ambiguïtés des relations humaines et de l’existence elle-même.

Sara Balogun