C’est donc à Laurent Robert, poète belge et professeur de littérature que revient le soin, après Philippe Bonvin, d’inaugurer notre parcours du mois de la poésie. Ce n’est peut-être pas un hasard, car les deux poètes francophones placent au cœur de leur recueil l’expérience de la Covid-19, entre vide, mort, création et confinement.
Entre sons et formes, langages et souffles, la poésie de Laurent Robert est portée par un rythme assez précis, pensé et contextualisé.
De son expérience de la Covid-19, Laurent Robert a écrit plus d’une centaine de poèmes dont la trame essentielle constitue les possibilités de survie au cœur d’une catastrophe subite. Ce recueil est donc un recueil de survie entre nos pertes, nos vides et nos espoirs.
Dans ce recueil, chaque poème est précédé d’un titre qui dit ou dit presque tout de l’exil interne du monde. Cela facilite la compréhension du lecteur. Les images, même difficiles, traduisent une certaine réalité et une vision de l’auteur. Des poèmes parfois sombres et parfois empreints de lumière et d’espoir qui fixent l’humanité et qui véhiculent quelque chose d’impermanent et d’évanescent. Une impermanence permanente, à la fois douloureuse et réjouissante, retenue, persistante et qui va s’imposant au fil du recueil.
Sans fioriture, mais avec beaucoup de réalisme et d’ouverture, tau cœur de chaque poème, sur le plan individuel et le plus souvent à partir de l’expérience, Laurent Robert brosse le portrait éclaté d’un ordre mondial poursuivi par ses propres démons : coronavirus, confinement, religion, soumission, Brexit, etc. Par petites touches, il nous conduit au sommet de la littérature avec une conscience réfléchie de l’état du monde. On pourrait même dire qu’il fait les états généraux du monde à partir de la littérature. Il mentionne des auteurs qui l’inspirent certainement : Péguy, Balzac, Bukowski, Rilke…
Sans détour, et avec finalement autant de simplicité que ses vers, l’écriture de Laurent Robert, pose un regard sur la société, l’interroge, l’analyse dans les moindres détails pour amener le lecteur à réfléchir sur sa vie et sur celle du monde, parce qu’il lui faut survivre.
La naissance, la mort, la mélancolie, les échecs, les relations, l’empathie, l’optimisme, la tranquillité, le sens de la vie, le racisme… Laurent Robert attire notre attention sur l’humanité traversée par des précarités et des insatisfactions. Son espérance, c’est de croire en la vie et donc de la chanter en compagnie de grands écrivains. Peu importe ce que la Covid-19 a apporté, nous n’avons pas le droit de désespérer. C’est un des charmes de ce recueil de poèmes, pleinement littéraire et pleinement social.
Nathasha Pemba