Lisa Bird-Wilson, écrivaine et poète Cri-Métis, occupe le poste de PDG de l’Institut Gabriel Dumont des études autochtones, une organisation dédiée au renouvellement et au développement de la culture et de l’éducation métisses. Son premier roman, « Possiblement Ruby », marque ses débuts littéraires aux États-Unis. Elle réside actuellement à Saskatoon, au Canada.
Dans ce récit captivant, le personnage principal, Ruby, guide les lecteurs à travers son parcours en tant que fille adoptée par un couple de Blancs. L’auteure offre un récit admirable, éclatant, minutieux et gracieux. L’émotion suscitée par ce retour aux sources, touchant non seulement à l’enfance et à la famille, mais également à une vision du monde façonnée par des dispositions élégiaques, est palpable.
Lorsqu’une crise identitaire s’empare de Ruby, attribuée en grande partie au divorce de ses parents adoptifs, elle se trouve plongée dans une vulnérabilité profonde. La découverte de ses racines autochtones devient sa priorité, entraînant un processus d’autodestruction marqué par la consommation d’alcool.
L’auteure décrit avec finesse l’état mental de Ruby à ce moment crucial de sa vie, laissant au lecteur le soin de mesurer les conséquences de ses choix. Par-delà cette histoire personnelle se dessine le tableau de la culture autochtone et de ses liens avec l’adoption. La quête d’identité, la reconnaissance envers les parents adoptifs sans idéalisation, ainsi que l’exploration des limites parentales et des difficultés d’insertion dans la société, transparaissent dans le récit. Ruby qui préfère ses amis aux parents adoptifs, trouve réconfort et soutien dans leurs folies et présences précieuses.
Une originalité du roman réside dans la focalisation sur Ruby en tant que figure centrale, changeant la perspective habituelle qui met en avant les parents lorsqu’il est question d’adoption. La question déterminante de l’identité émerge lors d’une séance de thérapie avec Karl, où Ruby explore ses sentiments, oscillant entre son enfance et son statut d’adulte.
Le fait que tu aies été adoptée n’a pas d’importance, d’accord ? Alors, sors-toi ça de la tête tout de suite.
Une variété de personnages peuple le parcours de Ruby, chaque chapitre se centrant sur une personne influençant sa vie à différentes périodes, depuis sa naissance jusqu’à ses efforts pour récupérer et préserver son legs métis pour ses propres enfants. Si sa famille adoptive lui a apporté beaucoup, elle l’a également entraînée dans un gouffre en lui cachant certaines vérités. Ruby aspire à éviter ce mensonge à sa progéniture en créant une histoire métisse avec des autochtones omniprésents dans son environnement.
« Possiblement Ruby » dépeint non seulement la quête d’identité, mais également une affliction, une dévastation furtive, une acrimonie qui reflète la traversée des jours et la colère inhérente aux situations difficiles comme l’adoption. L’auteure, sans catégoriser ni indexer une communauté spécifique, incite à une réflexion approfondie sur des questions sociales et historiques réelles, telles que les pensionnats autochtones.
Sara Balogun